Terminé en mai 1918, le Livre de la Guerre de Cent Ans n’a été achevé d’imprimer qu’en 1921 à cause de la pénurie d’encre, de pigments et de papier provoquée par la guerre. Bofa ne se montra guère satisfait d’une réalisation « au trait et au pochoir, et à l’économie aussi ! » Et de fait, le livre, tiré à 401 exemplaires, était rare, cher et raté. Le papier de mauvaise qualité, l’impression baveuse, les couleurs plombées et mal équilibrées (une variation entre beige et caca d'oie), y abîment le dessin et lui ôtent beaucoup de sa force et de son ironie.
Les éditions Cornélius en proposent aujourd’hui une nouvelle version, corrigée des erreurs et des trahisons de la première publication. Après nettoyage et restauration du trait, les couleurs ont été recréées en se basant et sur les dessins originaux de Gus Bofa pour La Baïonnette, et sur son travail pour Synthèses littéraires ou Don Quichotte. Le bleu, notamment, a été réintroduit dans la gamme, après constatation qu’il figurait sur certains des cinquante exemplaires sur Hollande mais était absent, par souci d’économie, des 340 sur Vergé.
Une quinzaine de dessins inédits (sept dessins grivois, sans doute réalisés pour amuser Pierre Mac Orlan, 5 dessins figurant sur l'exemplaire du Livre de la guerre de Cent ans offert par Bofa à la très riche madame Paul Verdier, 3 originaux des dessins parus dans La Baïonnette et un dessin montrant Pierre Mac Orlan et Gus Bofa "retour de la guerre de cent ans") vient enrichir ce volume qui permet au lecteur contemporain de découvrir le pamphlet de Gus Bofa dans toute sa vigueur satirique.
Le public semble avoir apprécié les efforts faits puisque le tirage de l'album s'est vendu en quelques mois!
Le Livre de la Guerre de Cent Ans dresse le portrait féroce d’une humanité imbécile qui, dépassée par la catastrophe qu’elle a déclenchée, fait le dos rond et se résigne au pire, soudain consciente de l’absurdité de sa destinée. Un livre trop longtemps ignoré, qu’il faut désormais ranger à sa véritable place, entre Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline et La Comédie de Charleroi de Drieu la Rochelle.
Préface par Emmanuel Pollaud-Dulian.
En mémoire de Léon Roger Weil (1896 - 2006).
Voici enfin, pour finir, un dessin original du Livre de la Guerre de Cent Ans, réapparu à ml'occasion d'une vente publique en 2009.